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Et si on reparlait d’immobilier ?

2023

Chaque intervention de la BNS rapproche un peu plus le taux directeur de sa moyenne historique. C'est encore le cas aujourd'hui avec une hausse de 50 points de base. Mécaniquement les rendements des immeubles exigés par les investisseurs s'ajustent et, comme à chaque trimestre depuis juin 2022, les transactions témoignent d'une baisse du prix des actifs compensant la hausse des coûts de financement.

« Mauvaise tendance », diront certains. Ce n'est pas notre analyse.

Le marché immobilier a vécu sous cloche pendant plusieurs années, sclérosé, comme verrouillé par des rendements historiquement bas. Les acteurs institutionnels, contraints d'investir des sommes importantes pour échapper aux intérêts négatifs, ne pouvait plus différencier, par le prix, les actifs bien entretenus des actifs vétustes, les actifs bien placés des actifs excentrés, les actifs écologiquement exemplaires des passoires énergétiques, etc.

Les levées de fonds qui n’atteignent plus les résultats escomptés, et les investisseurs dont, pour certains, le bas de laine est encore conséquent, qui attendent la fin de l’augmentation des taux, participent à une diminution de la demande. Certains propriétaires, les yeux encore rivés sur les indicateurs des 3 dernières années (comme certains évaluateurs d’ailleurs) mettent en vente leurs biens pour décrocher la timbale. Il est trop tard. L’érosion de la demande, l’offre abondante et les incertitudes économiques ont fait leurs œuvres. Les prix baissent. Les acheteurs renouent avec des rendements plus significatifs. Les acheteurs ont à présent le choix et ont regagné une latitude d’action en matière de prix offerts.

Les « equity buyers » que sont les assureurs et les fonds de pensions profitent donc particulièrement de la hausse. Les perspectives sont donc meilleures pour les assurés et les retraités.

Que constatons-nous ?

Logiquement, les investissements se portent sur les actifs les plus attrayants, c’est-à-dire bien situés, énergétiquement vertueux et offrant des durées de bail de long terme. L’écart de prix entre les actifs plus et moins qualitatifs se creuse ainsi et permet de réenvisager des acquisitions à valeur ajoutée.

Bien sûr, cette dynamique aura un impact sur la valorisation des portefeuilles et l’attitude, disons-le, irresponsable des évaluateurs, consistant à dire que les preuves de la baisse n’étaient pas suffisantes en fin d’année 2022 va participer à l’affaissement à venir. En refusant de constater les tendances déjà bien marquées durant le second semestre 2022, les évaluateurs des grands institutionnels n’ont fait que reporter le problème et ont rendu un « soft landing » impossible. Un interlocuteur avisé me disait durant le Mipim qu’« agir de la sorte c’est conduire une voiture en se privant du parebrise pour n'utiliser que le rétroviseur ». On peut affirmer que les pertes de valeurs vont être considérables d’ici fin 2023.

C’est donc une nouvelle ère qui s’ouvre à nous. Finis les paradigmes liés aux taux négatifs ; le marché renoue avec des logiques conventionnelles. La période s’annonce riche en opportunités et les conseillers en immobilier retrouvent une valeur ajoutée plus lisible ; bien vendre et bien acheter requièrent aujourd’hui du savoir-faire, de l’expérience et un excellent réseau. Et si on reparlait d’immobilier ?

par Grégory Grobon, CEO